Relève, caleçon et oeufs

Les tranchées le 19 septembre [1915]

Ma chère Louise et mes chers petits enfants

J'ai bien reçu ta lettre ce soir dattée du 16 qui m'a fait bien plaisir en apprenant que t'étais en bonne santé. Ca me surprend que tu t'attendais à recevoir une lettre de moi et que tu en avais pas, car il fallait qu'il y est au moins 3 jours que tu en avais reçu et je t'écris tous les 2 jours et quelquefois tous les jours. Mais il peut s'en trouver qui s'égare car aujourd'hui j'ai reçu une lettre d'Amélie qui me dit qu'elle en a pas reçu de moi, depuis que je suis retourné et je suis sûr que je lui ai écrit. Je ne vais pas lui rendre réponse car elle me dit qu'elle va partir à La Roche et comme elle serait peut-être à La Roche quand elle l'aurait reçu, je pense pas que c'était la peine. Tu lui souhaiteras bien le bonjour pour moi.

Nous sommes relevés cette nuit des tranchées. Nous devions y rester plus longtemps mais c'est un ordre qui est venu aujourd'hui. Nous allons au repos mais je ne sais pas où et pour combien de temps. Peut-être que nous resterons pas dans la contrée où nous sommes.

D'ici quelques jours, tu ferais bien de m'envoyer mon caleçon de laine. Je n'en ai pas encore besoin mais les nuits vont devenir à être fraîches. Tu pourras faire un colis postal que tu m'enverras par le train sans le mettre au dépôt, il y en a qui en ont reçu. Comme ça, ça ne met que 4 ou 5 jours. Les oeufs que tu m'as envoyé étaient pas trop mauvais mais ils étaient tous fêlés et le sel que tu avais mis avait fondu et s'avait donner de la sente.

Aujourd'hui, j'ai reçu aussi des nouvelles de Auguste DROUAULT. Il se plaît aussi bien auprès de chez lui qu'à Vittel mais il ne croit pas y rester longtemps.
J'ai reçu aussi des nouvelles de Augustin et Eugénie. Comme tu vois j'avais de la correspondance. Je ne sais si Joseph va aller en permission comme il le dit, mais chez nous elles sont suspendues pour quelque temps. J'ai bien fait d'y aller quand il était temps.

Je ne vois pas grand'chose à te dire autre chose. Je vais terminer en t'embrassant bien fort avec mes chers petits enfants et Amélie et Simone s'ils sont là.

Ton petit mari qui pense à toi.

Henri